Ashley était assise sur le banc dans la véranda du chalet, enroulée dans un plaid. Dehors, les flocons tombaient sur la montagne et le silence était presque pesant. Elle avait réservé le plus petit des chalets pour le weekend et elle avait trainé Evan loin de ses raptors pour le weekend. Autant dire qu’elle avait eu peur de ne pas le voir se pointer lorsque, quelques heures plus tôt, elle l’avait attendu avec une jeep à la sortir du centre animalier. Mais, elle n’avait pu s’empêcher de rayonner quand elle l’avait vu arriver. C’était elle qui avait conduit jusqu’au bas du télésiège avant de finalement laisser là la voiture. Tous deux avaient ensuite emprunté le télésiège, puis crapahuté dans la neige jusqu’au chalet avec leurs sacs. Ce n’était pas loin, et tant mieux : Ashley n’aurait pas pu marcher tellement plus longtemps. Depuis quelques temps, elle était fatiguée. La jeune femme plus si jeune que ça mettait cela surtout sur le compte du surmenage.

Depuis qu’elle était dans cette école, elle n’avait pas pris un seul jour de congé. Vraiment aucun. Elle avait l’impression qu’elle ne finirait jamais par s’en sortir. Elle travaillait d’arrachepied, vraiment à deux cent pourcent. Et, elle n’en voyait plus le bout. Il fallait avouer que cela avait clairement eu du bon : elle avait réussi à tempérer, si ce n’était détruire, la peste de Lilith. Mais, cela avait aussi et surtout un désavantage certain : elle avait l’impression qu’elle ne s’en sortirait jamais.

Ce qui lui avait permis de tenir ? Les nuits dans les bras d’Evan, à oublier tout ce qui pouvait être oublié, mais surtout à se gorger de toutes ces hormones qui faisaient un bien fou au cerveau et lui permettait d’éviter de sombrer. Mais, là, la jeune femme avait gagné un mois entier de vacances, et elle avait prévu de le passer à faire du ski, s’envoyer en l’air, manger gras et s’envoyer à nouveau en l’air. Totalement. Rien d’autre. Le chalet était à elle et à Evan jusqu’à Noël. Si Evan allait devoir retourner bosser après, elle avait cependant l’intention de profiter de lui jusque là.

Dehors, la neige tombait à gros flocons duveteux. Ashley avait entre les mains une tasse de thé aux agrumes brûlante, et elle souriait. La nuit était tombée depuis longtemps et elle avait l’impression que le monde était en train de s’arrêter. Enfin ! Ashley avait réellement eu besoin de cette petite pause, et elle était contente de pouvoir se l’accorder. Elle tourna la tête vers l’intérieur du chalet. Elle n’avait aucune idée de l’endroit où était Evan. Chéri ? Elle commençait à avoir faim. Elle avait pris des pommes de terre, et de quoi faire une raclette. Les patates cuisaient depuis un petit moment. Tu peux vérifier s'il reste de l'eau dans la casserole ? Le cas échéant, cela signifiait que c'était cuit. Trop cuit.

Des vacances avec Ashley, non seulement c'était un pur bonheur, mais c'était également une grande première. Je prenais des vacances quelques fois, mais pas ma belle, elle préférait s'acharner au travail plutôt que passer du bon temps autrement. Bien que nous passions du temps tous les deux... du bon temps... Ce n'était rien comparé à du bon temps h24 dans un chalet. Nous nous voyons d'ordinaire en coup de vent dans les couloirs de l'école, une heure au déjeuner et le soir quand elle venait chez moi... mais nous n'avions pas encore eu l'occasion de passer autant de temps d'affilé tous les deux.... J'espérais secrètement que cela ne lui donnerait pas envie de s'enfuir en courant ou de me planter un couteau pour me faire taire.

Cherchant un long moment dans mes bagages un objet que j'avais ramené, je n'avais pas encore rejoint Ashley qui était déjà dans la véranda, elle commençait à s'impatienter, je le sentais avant même qu'elle ne m'adresse la parole. Faisant un boucan de diable, je n'avais pas réellement compris ce qu'elle m'avait dit, jusqu'à ce que je réfléchisse et comprenne. Je me suis détaché de mon bordel pour me rendre dans la cuisine et constater les dégâts :
- Et si il n'y a plus d'eau, c'est bon? J'espère que t'aimes les pommes de terre roussies...
Oh bien sur, il en restait encore et cela signifiait que les pommes de terre avaient fini leur effroyable épreuve de cuisson et que je pouvais tout couper, mais j'avais envie de faire une frayeur à Ashley et avant qu'elle ne se lève pour m'engueuler de ne pas avoir surveiller la cuisson...
- Te lève pas, c'est trop tard tu sais... On va devoir se manger l'un l'autre pour pas mourir de faim... Ou manger les pommes de terre qui ont une cuisson parfaite au final.

Rigolant de ma blague idiote, je suis retourné dans mes affaires pour mettre la main sur ce que je cherchais et j'ai tout mis dans ma poche. Le pantalon suffisamment assez large pour cacher tout ça et j'ai rejoint Ashley finalement.

Prenant une bouffée d'air frais à peine la porte ouverte, un sourire ravi sur le visage, j'ai finalement soupiré en lâchant :
- Enffiiiiiiin ! On peut manger si tu veux, J'dirais même qu'on pourrait manger dans la véranda qu'est ce que t'en dit?
L'environnement s'y prêtait bien et j'avais mis un pull suffisamment chaud... Cependant, je suis retourné à l'intérieur pour aller chercher ce qu'il manquait et j'ai mis tout ça sur la table en bois de la pièce.

Une fois tout le nécessaire en place, j'ai été cherché une veste à moi pour la mettre sur les épaules d'Ashley, je ne voulais pas qu'elle n'attrape une saloperie, ça gâcherai les vacances et j'avais pas envie de passer mon temps à devoir la réchauffer en la frottant toute la journée... Je voulais plutôt la réchauffer autrement et ça ne serait pas possible si elle avait déjà mal partout.

M'asseyant en face d'elle, je l'ai regardé en souriant comme un con, j'étais heureux de l'avoir rien que pour moi.
- ça va être bien... Seulement tous les deux, non?

Alors qu’Evan revint dans la pièce principale, Ashley l’entendit lui dire qu’il n’y avait plus d’eau dans la casserole. Ashley se leva avec un soupir lassé mais elle n’eut pas le temps de faire un pas que son homme lui disait de rester dans son coin. Elle l’écouta et resta immobile quelques secondes avant de se laisser tomber sur la couveuse avec un soupir amusé. Bon, elle le prennait bien, mais il fallait réellement qu’il arrête avec ces blagues à la con. Parce qu’un jour, elle allait réellement lui taper dessus. Et, il n’allait pas aimer du tout c qu’il allait trouver. Car, Ashley tapait fort quand elle s’y mettait. Vraiment, vraiment très fort. Arrête de me prendre pour une cruche lâcha-t-elle en refermant le plaid autour de ses épaules. Après tout, elle était bien là. Vraiment bien. La neige tombait sous ses yeux, et elle avait l’impression que l’immensité blanche n’existait que pour elle, de l’autre côté de la vitre de la véranda. Elle pencha lentement la tête sur le côté. Elle soupira et se leva. Manger dehors ? Quelle drôle d’idée ! Il fallait manger à l’intérieur, dans la véranda. Il y faisait bien meilleur Manger dehors en plein hivers. Décidément, cet homme lui réservait bien des surprises. La veste sur les épaules, elle aida Evan à installer sur la table de la véranda tout ce qu’il fallait pour dîner.

Installée en face de lui elle lui sourit et haussa les épaules. C’est toujours bien quand on est tous les deux, non ? Elle se pencha en avant et se servit des pommes de terres dans son assiette, ajoutant du fromage fondu et de la charcuterie avant de commencer à manger. Tu es sûr que ça ne t’embête pas que je t’ai forcé à venir avec moi ?

La réflexion d'Ashley concernant l'eau m'a fait sourire, cependant je n'ai pas répliqué pour ne pas l'exaspérer davantage. Je me suis contenté de ramener tout ce qu'il fallait pour manger dans la véranda, je me suis ensuite installé après avoir mis une de mes vestes sur les épaules de ma douce.
La regardant se servir, j'ai attendu pour en faire de même avant de lui répondre à mon tour :
- C'est toujours génial quand on est à deux, sauf quand t'essaye de ranger ma cabane...
Elle m'énerve quand elle fait ça parce que je ne retrouve plus mes affaires ensuite, mais est ce que je peux vraiment lui en vouloir de ranger... après tout, elle passe du temps chez moi et j'aimerai qu'elle s'y sente bien, alors j'ai terminé en lui faisant une grimace, amusé.
Prenant à mon tour des pommes de terre et mon fromage, j'étais plongé de le remplissage de mon assiette, quand Ashley s'est remise à parler.
- T'en vouloir, pourquoi? Bien que je vais certainement appelé l'Institut fréquemment pour mes raptors... Tu m'as arraché à mes raptors chérie... C'est pas cool ça... Mais je suppose qu'ils auraient crevés de froid ici avec nous...
J'ai fait la moue, j'adorais mes bêtes, vraiment beaucoup et être loin d'eux ça m'arrachait le coeur. Après tout, j'avais attendu super longtemps pour les obtenir enfin et je les bichonnais constamment... Mais là, j'étais obligé de bichonner Ashley h24 à la place... Faut dire que j'y gagne quand même.

Si tu rangeais toi-même, je n’aurais pas à le faire. Ashley tira la langue à Evan. Et, si on doit vivre ensemble un jour, il faudra juste que tu arrêtes de poser les objets à un endroit et de les y laisser au lieu de ranger. Ce n’était pas un reproche. Ashley brandit sa fourchette et la pointa vers son amoureux. Sinon, c’est moi qui le fait. En plus, ça me détend, après une dure journée à l’infirmerie. Elle sourit et elle haussa un sourcil avant de se servir. Elle remplit son assiette à ras bord et elle commença à manger. Et elle lui demanda s’il lui en voulait de l’avoir trainé ici. La réponse fut négative et elle secoua lentement la tête de droite à gauche.

Tes raptors ? Décidément, quand elle pensait les avoir laissés loin, les voilà qui revenaient. Elle sourit et elle secoua la tête une nouvelle fois. Je peux te faire des trucs que tes raptors ne pourront jamais te faire. Elle lui jeta un regard lubrique et elle croqua dans une pomme de terre avec un sourire. Elle haussa les épaules et jeta l’idée loin. Enfin, là j’ai surtout faim. elle regarda la neige qui tombait de l’autre côté des vitres de la véranda. Elle avait l’impression d’être à l’autre bout du monde, et d’être simplement elle-même. De ne plus avoir à porter de masque. Son étrange passé, son étrange pacte… Tout ça était très loin. Vraiment très loin. On est seuls au monde.

La petite pique amusée d'Ashley m'a fait arraché un sourire, j'aimais quand elle me taquinait parce que j'en faisais autant avec elle et je le crains, je déteins sur elle.
Sérieuse au début de notre relation, le temps avait fait qu'elle s'était davantage détendue et s'autorisait des écarts de conduite en ma présence, des choses qu'elle n'aurait jamais fait avec d'autres personnes... parce qu'il était toujours obligatoire de garder bonne figure, non? Si cela ne tenait qu'à moi, je dirais que non, mais Ashley tiendrait surement un autre discours si vous alliez lui demander.
Je me suis contenté de lui répondre à sa remarque :
- Parce que tu compte vivre avec moi? Je ne risque pas de t'énerver avec mon humour pourri? Tu me supportes là, mais peut être que h24... t'aurais envie de me planter cette fourchette de la gorge...
Finissant ma phrase en montrant les piques ornant la fourchette entre les mains délicates d'Ashley et j'ai fini par un clin d’œil. Je me suis mis à rire en répliquant :
- Alors pourquoi je le ferai si tu vas t'en occuper? Si en plus ça t'amuse... je passerai plus de temps à faire ce que j'aime... Reluquer tes fesses se dandiner quand tu ranges par exemple.
Un regard carnassier en disait long sur mes propos.
Je me suis ensuite tourné l'air de rien vers mon assiette pour planter une pomme de terre et la mettre dans ma bouche. J'ai rigolé quand Ashley a parlé de mes animaux, d'un air désapprobateur et j'ai failli m’étouffer.
Je me suis repris en buvant une gorgée de mon verre et avaler sans faire de fausse route. Mais Ashley m'a fait vivement relevé la tête quand elle m'a indiqué ce qu'elle pouvait faire, je l'ai regardé d'un air amusé et quelques peu intrigué... j'avais hâte qu'on voit ça, mais elle avait faim... Alors ça aller devoir attendre.

J'ai profité de cette instant de silence pour dévorer mon assiette que j'avais remplis pas mal, elle me donnait faim et j'ai tout englouti rapidement.
- Et moi, ce grand air me donne une faim de loup !
Sur ces mots, j'ai replanté une pomme de terre du plat, pour la mettre à ma bouche, sans prendre la peine de la poser pour la découper.
La bouche désormais pleine, je ne pipais mot, même si je savais que je devais être moyen moyen... La bouche pleine, comme si je n'avais pas mangé depuis des jours et que je m'empiffrais comme un ogre.

Evidemment. Et nous aurons douze enfants. Bon, répartis sur plusieurs siècles hein. Après tout, la demoiselle était immortelle et son petit ami aussi. Ils avaient largement le temps pour ce genre de chose. Elle lui fit un sourire charmeur avant de hausser les épaules. Franchement… Si tu m’énerve, tu iras dormir avec tes raptors, au centre animalier. Parce qu’il était hors de question d’avoir ces bêtes féroce en guise de chiens de garde. Vraiment. Elle le menaça ensuite de faire le ménage dans l’appartement s’il ne le faisait pas lui-même. Et s’amusa de la réponse tout en levant les yeux au ciel. Je le ferais en sous-vêtements alors. Autant dire qu’elle était presque sûre qu’elle n’allait pas vraiment finir le ménage dans ce cas-là. Vraiment pas.

Ashley, malgré toutes ses vies, n’avait jamais vraiment été portée sur le sexe. Elle les avait revécues une fois, et si elle n’avait que peu de souvenirs de tout ça, elle se rappelait une chose. Une chose qui l’avait surprise. Le peu de fois où elle avait eu des amants. Si dans cette vie elle n’en avait pas eu non plus, elle s’était rendue compte que son passé, que ces mille vies offertes par les Dieux Oubliés avaient été un néant amoureux total et complet. C’était une des raisons qui l’avaient fait sauter le pas avec Evan. Son égo en prendrait certainement un coup. Un gros même. Elle aimait Evan. Elle avait eu un coup de cœur pour lui bien avant qu’il ne lui avoue ses sentiments à lui. Mais, elle était bien célibataire. Vraiment. Elle n’aurait jamais sauté le pas si elle n’avait pas vu ses anciennes vies. La demoiselle n’avait décidé de prendre sa vie en mains qu’en se décidant à sauter le pas que pour s’occuper de ses fesses, au sens littéral du terme.

Après avoir flirté une nouvelle fois avec Evan, la demoiselle se mit à manger. Non mais Evan ! Elle leva les yeux au ciel. Mange donc proprement ! Il avait croqué dans une pomme de terre comme si c’était la chose la plus normale à faire. Tu gâche tout le plaisir ! Elle rit et puis elle coupa sa patate, mangeant de manière un peu plus civilisée. Elle s’essuya les mains sur la serviette et tendit la main pour attraper son verre de vin. Vide. Elle se leva pour attraper la bouteille au bout de la table, bousculant au passage la chaise d’à côté. Tomba sur le sol une petite boite bleue contenant des tampons qu’Ashley ramassa avant de la poser sur la table d’un air pensif. Evan, quel jour on est, demanda-t-elle après un court silence et s’être resservi un peu de vin.

La première réponse d'Ashley m'a fait avalé mon morceau de pomme de terre de travers, alors tout en toussant, j'ai du boire une gorgée d'eau pour me calmer.
J'avais déjà du mal à m'imaginer avec un enfant, alors douze et cela même sur des siècles, je n'arrivais pas à mettre ça dans mon crâne. Elle voulait vraiment que je sois le père de ses enfants? Alors qu'elle n'a de cesse de me traiter de gamin, limite à être un poid pour elle qui veut toujours tout calculer?
Après tout, pourquoi pas puisque je suis assez fou de nature, avec autant d'enfants devraient être faisable et puis, ce n'est pas moi qui allait les porter...

Je n'est pourtant pas répondu à sa phrase, ma réaction suffisant d'elle même, je me suis contenté de lui répondre à la suite.
- Ce n'est pas comme si c'était la première fois, ils m'aiment bien tu sais... même si ils mordent, mais je vais quand même pas leur enlever les dents... T'imagines mes bébés sans dents ? Inconcevable ma chère !
J'en ai ri cependant, parce que j'imaginai déjà mes raptors sans dents, mais il faudrait aussi que je mixe les morceaux de viande et ça m'enleverait du temps pour Ashley et elle m'en voudrait à mort ! Puis moi aussi de toute façon.

J'ai hoché la tête par l'affirmatif concernant le ménage en sous-vêtements, bien que si elle faisait ça, je n'étais pas certain qu'elle termine vraiment de ranger avant que je ne lui ai enlevé le reste et que je ne les prise sur un tas de courrier non ouvert... Très romantique.

J'ai continué à manger, dans le silence le plus complet, s'entends mon ventre se remplie de plus en plus à mesure que je mettais les aliments à la bouche, vous me direz c'est normal hein... Mais mangez par simple gourmandise, à se faire éclater le ventre, c'est moyen quand même... Et j'ai porté un morceau de fromage entre mes dents.
J'ai rigolé quand elle m'a faite une réflexion, je n'ai pas pu m'empêcher de répondre :
-Oui maman !
Tout en m'essuyant sauvagement la bouche, histoire de voir sa réaction et l'énerver davantage.
- Tu fais trop de manière !
Et sur ces mots, j'ai posé mes couverts pour manger avec mes doigts au moment où Ashley a bougé l'une des chaises, faisant tomber ses tampons. J'ai eu une pause machinalement, qu'est ce que ça foutait là ça d'abord? Et la question d'Ashley m'a fait sortir de ma contemplation de la boite.
La bouche pleine toujours, les mains suspendues entre mon assiette et ma bouche, recouverte de morceaux, j'ai finalement répondu en m'etouffant à cause de la nourriture dans ma bouche.
-Mardi, j'crois... Pourquoi ? C'est quoi le rapport avec le voyage de tes tampons de ton sac à la chaise?
Et je me suis tut, et si? Non, pas possible.

Si vous aviez vu la tête d’Evan lorsqu’Ashley lui a balancé à la figure qu’elle voulait douze enfants… C’était tout simplement risible à souhait. La demoiselle cacha son sourire derrière sa serviette. Elle se tapota les lèvres et la reposa sur la table alors qu’il était en train de s’étouffer. Si jamais ça allait trop loin, elle pourrait décoincer ce qu’il avait dans la gorge. Après tout, elle était médecin. ça pourrait être intéressant de voir tes raptors sans dents, rétorqua-t-elle avec un sourire taquin. Surtout quand nos douze enfants joueront avec. Si jamais les raptors en mangent un, on devra le remplacer et c’est pas toi qui va devenir bouffit pendant neuf mois, ou avoir des nausées. Elle lui tira la langue et commença à manger avant de parler de faire le ménage en sous-vêtements pour égayer la chose.

Elle termina son assiette sans trop parler. Ashley était toujours bien plus concentrée par le contenu de son assiette que par ce qu’on pouvait lui dire. C’était quelque chose qu’Evan comprenait. Et une des raisons pour lesquelles Ashley l’appréciait. Elles étaient nombreuses, d’ailleurs. La jeune femme n’avait de cesse de le redécouvrir chaque jour. Et, s’il avait des défauts aussi visibles que le nez au milieu de la figure, cela n’empêchait pas l’immortelle de l’apprécier. De là à dire « pour toujours », probablement pas. Elle aurait besoin de pauses. Peut-être que dans un siècle ou deux, elle partirait à la poursuite d’un artefact sans lui. Ou faire des fouilles archéologiques sur l’Amérique détruite. En espérant que les démons n’y soit plus. Elle n’imaginait pas passer toute l’éternité sans avoir envie de lui donner des claques. Lui non plus, certainement. L’éternité, c’était long. Alors, être d’accord jusqu’au bout avec l’autre ? Pff ! Impossible. Ashley avait un sacré caractère, et Evan aussi. Ils finiraient par se disputer et par avoir besoin d’espace.

Evan mangeait comme un cochon, c’était un fait. Il le faisait juste pour l’embêter. La demoiselle finit par ramasser une boite de tampon tombée par terre. Ce n’était pas à elle et cela avait fait un gros blanc dans sa tête. Mardi… Le … quinze décembre ? C’était à peu près ça, probablement. Elle secoua la tête de droite à gauche. Et merde. Elle compta sur ses doigts. Une fois. Deux fois. Et puis elle secoua la tête de droite à gauche une nouvelle fois. J’ai un mois et demi de retard.

- Et si j'enlevai tes dents pour voir, hein ? Tu changerai peut être d'avis sur cette idée pour mes Raptors...
J'ai fait une pause pour réfléchir à ce que j'avais dit et j'ai imaginé Ashley sans dents et les occasions de s'en servir anéanti du coup...
- Nan, en fait... Oublie l'idée ! C'est même pire qu'imaginez mes Raptors sans dents...
J'ai fait une grimace avant d'en rire en repensant à Ashley et mes Raptors, complètement sans dents...
- Si on leur laisse leurs dents et qu'ils mangent un de nos enfants... On aura qu'à en refaire deux autres, pour pallier au prochain repas des Raptors, nan?
Et j'ai remis un morceau de pomme de terre dans ma bouche, dans le silence le plus complet jusqu'à ce que les tampons d'Ashley ne viennent troubler ce moment parfait : La bouffe, Ashley, la montagne... mais surtout en cet instant... : La bouffe.

Je ne voulais pas être méchant, j'adorai ma Ashley, mais quand on me parlait Raclette, charcuterie et pomme de terre... Je ne répondai plus de moi. Bien qu'après cette histoire de tampons, j'ai avalé mes pommes de terre de travers, jusqu'à répondre à Ashley et sa réponse me réduisant au silence le plus complet.
Mes yeux grands ouverts, je n'arrivais à répondre quoi que ce soit d'audible et de clair :
- Que... Qu... Quoi?? T'es pas sérieuse ?!
Je me suis levé d'un bond de ma chaise, la laissant tombait par terre sans chercher à la rattraper. De mes mains, j'ai attrapé mes cheveux au dessus de ma tête et j'ai fait les cents pas dans la véranda.
J'inspirai et expirai sans réussir à me calmer, jusqu'à prendre une grande inspiration et lâcher ce que j'avais prévu de faire durant ce séjour.
- Et moi qui voulait te demander en mariage aujourd'hui, avec la bague et tout...

Oh arrête, je suis sûre que tu adorerais que je touche certaines parties de ton anatomie sans dents, rétorqua Ashley avec un petit sourire mutin. Tous les hommes avaient envie d’essayer ça, non ? La femme sourit elle leva les yeux au ciel. Ben voyons, c’est pas toi qui va te taper neuf mois à devenir grosse comme une baleine et à avoir des nausées hein. Alors, je vais pas faire des gamins pour les donner à manger à tes joujous. Non mais ho. Ashley leva les yeux au ciel et elle poussa un profond soupir. C’était absolument n’importe quoi. Elle n’avait pas l’intention de subir plus de grossesses que nécessaire. Certes, ça allait bien à certaines femmes, mais elle avait peur que ce ne soit pas une bonne chose pour elle. Elle était médecin avant tout, et elle avait peur de se retrouver avec des pouvoirs défaillants au mauvais moment. Quant à porter un brouilleur… elle espérait que ce serait le moins longtemps possible. Elle n’aimait pas cette idée d’être coupée de ses pouvoirs.

Le repas continua normalement. En silence. Ashley adorait la raclette, et elle n’avait pas envie de parler. C'était ça de bien avec Evan. Il n’avait pas forcément envie de parler tout le temps. Le silence ne les gênait ni l’un ni l’autre. Enfin, jusqu’à l’accident du tampon. La tête d’Evan quand elle lui annonça avoir du retard. Un mois et demi. Cela voulait dire qu’elle était enceinte depuis deux mois, environ. Elle baissa ses yeux vers son ventre encore plat et y posa la main. Ce n’était tout simplement pas possible. Elle ne pouvait pas… Elle ne voulait pas… Ce n’était pas le bon moment ! Vraiment pas. Ashley ferma les yeux un instant. Elle avait le tournis. Elle avait l’impression qu’elle était en train de tomber d’une falaise. Oui, elle voulait des enfants. Oui, elle les voulait avec Evan. Mais… Ce n’était pas prévu. Je suis sérieuse, articula-t-elle en relevant les yeux sur lui. Est-ce qu’il allait lui en vouloir ? Elle avait dû oublier de prendre la pilule. Une fois suffisait, après tout. Et puis, il lâcha quelque chose qui fit exploser de rire la demoiselle. Elle se plia en deux un instant et elle releva les yeux vers lui. Et moi qui pensait que tu allais m’en vouloir, fit-elle entre deux hoquets de rire. Elle se leva, pouffant toujours et elle contourna la table pour venir se placer juste en face de lui. Elle passa ses bras autour de son cou et attira son visage vers elle pour l’embrasser. Lorsqu’elle le relâcha elle sourit à nouveau. tu n’as pas posé de question, dit-elle simplement. Pas encore.