TOC TOC TOC

Dans mon rêve, je me tourne vers la porte, surprise. Attendez, qui vient me déranger là ? Non mais il est hors de question que ce rêve s’arrête comme ça. Je me tourne vers Thomas, allongé sur la lit, et me demande quand est ce que je l’ai quitté. Je lève les yeux au ciel et, féline, m’approche du lit. J’y grimpe à quatre patte, déposant des baisers le long de sa jambe, puis léchant le tatouage qu’il a sur la hanche, avant de remonter lentement jusqu’à ses lèvres.

- Où en étions nous déjà ?

Ma main descend le long de son flanc avant de recommencer un certain mouvement très très bas. Il m’attrape par la taille et m’allonge sur le dos. Sa bouche attrape la mienne et sa langue vient caresser la mienne.

TOC TOC TOC.

Je me retrouve debout devant la porte, encore une fois. Mes sourcils se froncent et je me retourne une nouvelle fois vers le lit. Cette fois, plus personne. Mais… où est Thomas ? Je suis seule face à la porte. Je regarde la porte et je secoue la tête de droite à gauche avant de soupirer. J’ouvre la porte.

Personne derrière. Je grogne un coup et claque la porte avant de me laisser tomber sur mon lit. N’importe quoi. Si même mes rêves m’empêchent de m’envoyer en l’air, je n’ai réellement plus de raison de vivre.

Et puis, soudainement, une bombe me tombe dessus et… Je me réveille. Je grogne. Je râle. Et je tourne la tête vers la bouille de…

- Rosie ? Putain il faut vraiment que je fasse changer les serrures moi…

Je me laisse retomber sur le dos, avant de vérifier un truc… Est-ce que j’ai mis un pyjama avant de dormir ? Je soulève légèrement la couette et pousse un soupir. Ça va. Culotte et débardeur. Nickel.

- Qu'est ce que tu veux, crapule ?

Je me redresse comme une fusée pour lui chatouiller le ventre et la faire rire, jusqu'à la relâcher et plonger mon regard dans le sien :

- Pour une fois que je n'étais pas de garde à 5heures du matin...Quelle heure il est d'abord ?

Après avoir chatouillé Rosie, je me laisse retomber sur mon dos et je pencha la tête sur le côté. Je l’adore, cette petite boule d’énergie, sauf quand elle m’empêche de dormir jusque midi. Je lui tire la langue en la voyant avoir du mal à se remettre de sa crise de rire, essuyant une larme ou deux, avant de me donner l’heure. Oui, bah neuf heures, c’est l’aube quand on avait prévu de dormir jusque midi. Pour une fois que j’ai un jour de repos.

- Une question ?

Intriguée, je me relève sur mes coudes pour observer la jeune fille en face de moi. Elle a grandi. Elle a beaucoup grandi. Maman et papa ne la reconnaitront pas la prochaine fois qu’ils la verront.

- Tant mieux, parce qu’il est hors de question que tu aie une vie sexuelle avant d’être majeure.

C’est la même chose que pour Sarah, bien que son anniversaire approche à grands pas. Zut alors. Je ne vais plus avoir de raison pour l’empêcher de vivre sa vie… Dommage hein ? La grande sœur que je suis n’arrête pas de tenter de garder ses sœurs dans le bon chemin, et elles n’en font qu’à leur tête. Le pire ça a été la fois où, à un cours d’éducation sexuelle, Sarah s’est pointée en chat pour roupiller dans un coin, et puis elle a eu une question à poser. Alors elle s’est retransformée en humaine, mais en gardant ses poils. Je ne vous raconte pas la façon dont le professeur a pété les plombs et la punition qui en a découlé…

Je prends le papier qu’elle me donne et je l’observe alors qu’elle m’explique ce qu’elle a en tête. J’ouvre la bouche puis la referme avant de relever les yeux vers ma petite sœur.

- T’es au courant qu’en France, la loi oblige celui qui se fait un tatouage à être majeur ? Même si tu vas chez les fey personne ne te feras un tatouage à quatorze ans, Rosie. C’est trop important. Tu marques ta peau à vie. Pour toujours.

Je soupire et secoue lentement la tête de droite à gauche avant de reprendre :

- Au henné, peut-être. Cela reste quelques mois, et au pire tu pourras le refaire avec tes sous de Noël quand il commencera à partir, avant de sauter réellement le pas si ça te plait à dix-huit ans.

Je lui rends le dessin avant de m’étirer dans mon lit. Je remonte la couette blanche jusqu’à mon nez et fais semblant de me rendormir.

-Bon, si t’as fini, j’ai une grasse mat’ à rattraper moi… Je rouvre un œil et la regarde quelques secondes avant de continuer A moins que tu aie une meilleure idée de comment passer ma matinée ?

J’éclate de rire en voyant ma sœur totalement déprimée par son dessin. Décidément elle n’a pas été chercher très loin dans cette histoire. Le tatoueur va s’occuper de finir le dessin, en fonction de l’endroit où tu veux le tatouage et de son style à lui. C’est pour ça qu’il faut choisir ton tatoueur avec attention, regarder son style, sa façon de dessiner et ce qu’il a fait sur d’autres personnes avant de te décider. C’est important.

Je n’ajoute pas la fin de ma pensée : celle que, si elle n’a pas pensé à tout ça, c’est qu’elle n’est décidément pas prête à avoir son tatouage. C’est un acte qui va marquer sa vie pour toujours, pas quelque chose qu’on fait parce qu’on en a envie sur un coup de tête. Rosie ne sait pas encore ce qu’est une vie entière.

- Par contre, pour le henné, la couleur tu oublies. Il n’y aura que du noir. Et, crois-moi, vu la douleur que ça donne avec la couleur, je te conseille de garder du noir, ce sera bien assez compliqué comme ça quand tu le feras pour de vrai.

Je fais mine de me recoucher et me glisse sous ma couette avant de proposer à Rosaria de faire autre chose. Un sourire monte à mes lèvres quand elle me propose quelques sorties. Je hoche la tête de haut en bas, puis je fronce les sourcils quand elle me dit qu’elle ne dort pas beaucoup.

- Je te propose un truc : je mets le réveil à midi, on va manger un bout à Moonlacre… disons… Au goût… Thé, pour manger des muffins et boire du chocolat chaud, avant d’aller faire un tour dans Paris pour quelques petits trucs, et de finir aux Halles pour le ciné.

J’attrape mon second oreiller et le lui met sur le ventre.

- T’en dis quoi ?

Je me rendors donc rapidement, et au bout d’une heure de sieste sous les coups de pieds de Rosie, je me réveille. Celle-ci est toujours endormie. Je file donc prendre une douche, arranger mes cheveux, enfiler un jean j’en passe et des meilleures. Je m’installe ensuite en tailleurs sous la fenêtre, sur le petit pouf que j’ai installé là en attendant que Rosalia se réveille. Un livre sur les genoux, je me laisse partir dans un monde tout à fait normal où le monde n’a pas de pouvoirs et de démons aux trousses. C’est mon pêché mignon, cette envie d’être normale. Cette envie de vivre dans un monde tout ce qu’il y a de plus ordinaire, d’avoir une histoire d’amour, une vraie. Malheureusement je ne suis pas tout à ait certaine que cela puisse se passer un jour. Dans ce monde, tout le monde peut mourir du jour au lendemain. Je laisse ma sœur dormir. Après tout, elle l’a mérité… Et au moins moi j’ai la paix durant quelques minutes ! Plus de blabla incessant.

J’en suis juste après leur premier baiser lorsque j’entends les ressorts du matelas couiner. Je relève les yeux et souris à la demoiselle qui émerge à peine : Salut Marmotte. Je lui laisse le temps d’émerger et lorsque je la vois descendre du lit, je hausse un sourcil amusée. Pendant que tu dormais, j’ai booké le programme de la journée. File te changer. Il va te falloir une jolie petite robe pour là où on va. Je t’attends. Je lève un doigt sévère pour faire taire la demoiselle avant même qu’elle ne parle : Surprise ! Je n’en dis pas plus, mais une tenue correcte est exigée !

Non, je ne veux pas qu’elle se change en marmotte, ma petite sœur métamorphe. Parfois, je me demande si Maman n’a pas trompé papa. Toute la famille est métamorphe sauf moi. Ce n’est pas juste. C’est un pouvoir que j’aurais adoré avoir, même si… Même si la guérison, ça a ses avantages, vraiment. C’est même très sympa. J’adore ça, et j’en ai fait ma vie. Enfin, c’est tout de même bizarre d’être la seule guérisseuse d’une famille de personnes capables de se changer en chat ou en chien. Ou alors, comme Rosie me le propose, en marmotte. Mais, il faudra passer ton examen de pouvoir si tu sais déjà faire une marmotte entière. Quoi qu’elle soit un peu jeune pour avoir des pouvoirs totalement fixés… Et donc la capacité de pouvoir les apprendre réellement. Non, pas vraiment. Quoique, chez certaines personnes, les dons peuvent se fixer un peu plus tôt. Tout cela dépend des hormones dans le sang. C’était l’objet de ma thèse.

Rosie s’enfuit de ma chambre et je profite de son absence pour enfiler une jolie robe à mon tour. J’enfile une petite robe noire moulante, très courte, avec des manches en dentelle qui descendent jusqu’aux coudes. Une paire de talons vernis, un sac à main et voilà, je suis prête. Ceci n’a pris que quelques minutes, et je sors dans le couloir pour aller vers l’escalier, mais Rosie arrive alors que je verrouille la porte. Surprise je t’ai dit ! J’attrape la demoiselle par l’épaule et je la dirige lentement vers le parc, puis nous traversons le manoir alors que je refuse encore et toujours de répondre aux questions de la demoiselle. Non, elle ne saura rien. Il est presque midi, et nous grimpons dans un taxi. Celui-ci s’arrête devant un restaurant assez chic, à ma demande, et nous entrons. Là, je m’arrête devant une immense affiche qui annonce « dégustation de chocolats » avec la date du jour.

Je laisse Rosaria ouvrir de grands yeux devant l’affiche alors qu’un serveur s’approche de moi pour demander si nous avons réservé. Oui. Au nom de Mancini. L’homme s’incline légèrement et nous guide jusqu’à une table où nous prenons place l’une en face de l’autre. Là, il explique à Rosie, puisque je suis déjà au courant Nous allons vous servir un repas normal, et au lieu du dessert, vous aurez une dégustation gourmande de chocolats du monde : un carré du chocolat utilisé dans la pâtisserie qui va avec, et bien entendu la pâtisserie, ainsi qu’un chocolat chaud.

Un rire amusé monte à ma poitrine lorsque ma petite sœur m’indique qu’elle pense que je me fiche d’elle. Je lève les yeux au ciel et pousse un soupir. Non, je ne me fiche pas de toi. On a vraiment une réservation, à mon nom, et on va vraiment manger du chocolat. C’est un endroit que j’adore, j’y serais allée seule si rosie n’avait pas débarqué. J’aurais peut-être dû lui proposer directement de venir, non ? Parce que je sais qu’elle adore le chocolat, et Sarah aussi. Mais, ces derniers temps, je suis un peu trop solitaire. Vraiment trop solitaire. Je ne pense qu'à moi et je n’ai pas réellement l’impression que le reste du monde compte. C’est comme une sorte de léthargie qui m’envahit petit à petit au fur et à mesure que le temps passe : je me ferme comme une huitre et je me retrouve de plus en plus seule, dans mon labo. Allons, Julia, il va falloir te reprendre. Parce que ça ne va plus là ! Vraiment plus. Je n’ai jamais été comme ça. Il faudra que j’envoie un SMS à Peter. J’en ai assez d’attendre après Thomas encore et encore. Ancienne Julia, me revoilà. Non, c’est bel et bien vrai mademoiselle. Nous nous installons donc à notre place, moi emplie de cette étrange sentiment d’avoir pris la décision la plus importante de ma vie. Mon regard se pose sur ma petite sœur, et nous déjeunons tout en discutant de tout et de rien. Je vois bien, avec cette étincelle dans son regard, qu’elle n’attend en réalité que le dessert et la dégustation de chocolat.

Et puis, soudainement, je réalise que ma sœur, loin de s’occuper du chocolat sur la table est en train de faire des catastrophes. Des vraies. Oh, rosie. Je me passe la main sur les yeux et tourne le bras en réalisant que j’ai touché quelque chose d’humide dans mon dos. Non, je ne vais pas essayer. C’est physiquement impossible de se lécher le coude. Je tourne la tête vers l’animateur avec un sourire contrit Pourriez vous nous apporter des serviettes ? Parce qu’on ne va pas en avoir assez là. Je maintiens mon bras éloigné de ma robe – hors de prix, rappelons le – pour ne pas la tâcher, et attrape la serviette que me ramène le jeune homme – assez séduisant il faut l’avouer – pour envelopper mon coude et retirer le plus possible de chocolat dessus. Oh, rosalia, essaie de bien te tenir. C’est un restaurant étoilé. Je lève les yeux au ciel et attrape une petite cuiller pour manger un peu de chantilly qui se trouve sur mon chocolat chaud. J’attrape ensuite une rondelle de banane et la plonge dans la fondue de chocolat pour en tester le goût. Il y a aussi divers petits carrés sur la table, un fondant mais aussi et surtout, cette fondue de chocolat qui va me tomber droit sur les fesses. Je vais devoir aller transpirer pour évacuer tout ça. Ou alors, je ferais un autre type de sport. Plus intime. Mais, tout aussi efficace.

Excuses acceptées, dis-je avec un sourire amusé. Oui, après tout elle a treize ans, ce n’est pas non plus énorme. A son âge, j’en faisais des bêtises moi aussi. Et des pires. Enfin, pour le coup, je me suis calmée en découvrant la sexualité. Oh, Rosie, par pitié, ne sois pas aussi précoce que moi là-dessus. Il ne faut pas que tu te calme. Vraiment pas. Je me mord la lèvre inférieure pour ne pas éclater de rire à cette idée. Enfin, j’espère que lorsque ce jour arrivera, je serais mise au courant, histoire que si jamais ça se passe comme ce que Sarah a vécu, je puisse agir de la même manière que j’ai agit pour Sarah.

Quoi qu’il en soit, je m’occupe de mes fruits et les trempe dans le chocolat fondu, mange mon fondant et tout le reste qui se trouve sur la table, sans même rester raisonnable. Je trouverais bien un garçon pour me faire faire du sport. Je dois avouer que je proposerais bien au serveur de m’aider… Qu’est ce qu’il est mignon celui là. Ou alors, je vais appeler Thomas, mon Chasseur. Je porte ma tasse à mes lèvres et goutte un peu, tente de rester calme et de ne pas me jeter sur tout. Ca non. J’adore réellement tout ce qu’il y a devant moi. Oh, plutôt deux cent. Heureusement, ce n’est pas tous les jours… Car sinon, ce serait difficile de garder la ligne ! Mais, c’est meilleurs quand c’est rare, non ? Une fois mon estomac tellement plein, je repousse mon assiette et attends que Rosie finisse elle aussi, et je lui propose de rentrer. Allez, viens. Il est temps de retourner à l’école. Ça t’a plut ?