Les émotions peuvent évoluer au cours du temps... Et du temps j'en ai eu, plus de 2400 ans. Des traits de caractères peuvent se modifier en fonction de la vie... Et ma vie n'a pas été de tout repos.
Cependant, il est des choses qui ne changent pas. La nature profonde d'une personne ne la quitte jamais réellement. Et lorsque la vie lui permet de reprendre un rythme plus lent, plus doux, plus serein, elle retrouve enfin la joie que de profiter de la vie peut lui procurer.
J'ai toujours été quelqu'un de droit, franc et intègre et cela n'a jamais changé. Ma capacité à voir les événements passés, futurs et présents est un réel don des Dieux. Je me dois de respecter cette offrande qu'ils m'ont fait. Cependant, si je les remercies pour celle-ci, je n'en demeure pas moins effrayée par eux. En particulier Apollon. Le temps a beau passer, il demeure ma seule vraie terreur. Une frayeur qui me donne des frissons et me fige d'effroi. La peur ne fait pas partie de mon vocabulaire. Tout du moins pas celle qui vous paralyse. La peur me donne de la force, à moi, frêle petite créature.
Toutefois, depuis que ma vie est intimement liée à l’Institut Chevalier, des nouvelles facettes de ma personnalité se sont développées. Certaines peuvent paraître antagonistes mais d'une certaine manière, il n'en est rien.
La première est le mensonge. Etre capable de savoir l'évolution du temps a de quoi mettre mal à l'aise. Savoir certaines choses sur les personnes qui m'entourent n'est pas toujours évident. Cependant, à leur contact, j'ai apprit à tenir ma langue sur certaines découvertes. Pour le bien de tous. Je ne contrôle pas toujours, même après plusieurs millénaires, l'arrivée de ces visions. Le mensonge, dans ce cas précis, s'avère une bénédiction pour tout le monde, évitant bien des déconvenues. Plus le temps passe, plus ces mensonges m'apparaissent davantage comme des secrets que les personnes m'auraient confié et que je évertues de garder, comme cela s'impose. Cela dit, parfois, il m'arrive de prendre les personnes concernées entre deux yeux et de leur dire ce que j'ai apprit à leur sujet bien malgré moi. Quand cela se produit, seule la personne intéressée est mise au courant de cela. Tout comme lorsqu'il arrive à des personnes de venir me demander conseil.
L'autre facette de moi qui s'est développée au fil du temps passé à l’Institut, c'est quelque chose que j'avais oublié. Quelque chose qui remonte à mon enfance, enfance vite effacée lorsque je suis devenue Pythie d'Apollon... La joie de vivre. La concentration l'avait effacée durant mes premières années en tant que Pyhtie. La peur face à la colère d'Apollon l'avait fait totalement disparaître... Les années d'errance, traquée par celui qui voulait m'exterminer pour avoir refusées ses avances...
Aujourd'hui, j'ai retrouvé ce plaisir de vivre au côté d'autrui et de partager des moments agréables et joyeux avec eux... Hommes, femmes enfants confondus.
Oui, hommes aussi... Parce que ce n'est pas parce que je tiens à préserver ma pureté que je ne peux pas avoir d'amitié pour un homme. Ce n'est pas toujours facile, pour les hommes, j'entends. Je comprends parfaitement que ce soit le cas. Mais je trouve cela dommage. Je suis la plupart du temps une boule d'énergie fraîche et pétillante. Même si il m'arrive d'avoir besoin de solitude quand des vagues de visions m'assaillent. Il m'arrive aussi de me retrouver empreinte d'une certaine mélancolie lorsque une étrange impression de ne plus être à ma place grandit en moi. Je ne sais d'où elle vient et fait tout pour la rejeter.
Parfois, mes élèves me trouvent un peu sévère, mais je me considère plutôt comme quelqu'un de juste. J'adore toutes ces petites têtes blondes (Oui, petites, même quand ils ont 20 ans, ils restent tout jeunes pour moi!).
D'ailleurs, en parlant de mes chers petits, il est aussi une facette maternelle que j'ai appris à trouver au fond de moi. Je n'ai jamais eu d'enfant, cela est évident. Mais vivre avec les élèves a développé ce sentiment en moi, non, plus qu'un sentiment, une force puissante, un ronronnement capable de se transformer en rugissement. Et lorsque ce côté maternel prend le dessus, je deviens une vrai lionne. Puisant dans les ressources qui se sont développées lors des longues années passées à me cacher, à errer telle une ombre. Me protéger était devenu une obligation à de cette époque et j'avais apprit à me défendre de bien des façons.
Pour faire court, je suis quelqu'un de doux, ouvert au monde et généreux... Mais aussi de courageux, intègre et têtu.
Depuis toute petite, mes rêves étaient mes meilleurs amis. Ces mondes qui n'appartenaient qu'à moi, ces personnes que je connaissais, ou ne connaissais pas... Mais qui constituaient un univers où je pouvais me réfugier à chaque fois que j'en avais besoin.
Oh non pas que ma vie était désagréable. Je vivais une vie heureuse auprès des mes parents tout près de la belle cité de Delphes. Ce n'étaient pas mes vrais parents, ils ne pouvaient pas avoir d'enfants. Mais je les aimais tout autant et cet amour était réciproque. Ils m'avaient trouvé alors que je n'étais qu'un bébé et m'avaient élevés comme si j'étais leur propre enfant. Ils m'ont entouré d'amour et j'ai connu le bonheur.
Mais mes rêves n'en demeuraient pas moins mes meilleurs amis.
Jusqu'au jour où j'ai découvert que mes rêves n'en étaient pas... Je venais de fêter les 7 ans, et la gentille vielle dame que je voyais toujours aller chercher de l'eau à la fontaine – j'aimais beaucoup cette dame – la gentille dame était tombée la tête dans l'eau... Et le lendemain de mon rêve, maman m'avait apprit qu'une vielle dame était morte de la même manière. C'était la première fois que je m'étais posée une question à propos de mes rêves. Quelques semaines plus tard, j'ai raconté, pour la première fois de ma vie, un de mes rêves à papa... Et j'ai découvert que ce rêve était précisément celui de la rencontre de mes parents.
Mon destin était alors posé... Je possédais le don... Et la Pythie était morte quelques jours plus tôt... Cela ne faisait aucun doute que j'allais être celle qui allait la remplacer.
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Et ma vie de rêve se transforma alors en cauchemar. On m'emmena dans une grotte, on me fit boire de drôle de potions... Et les rêves n'ont plus cessé. La réalité n'avait plus de raison d'être, je vivais perpétuellement plongée dans un amas de visions... Et je ne vivais plus pour moi-même mais uniquement pour Apollon et pour ces personnes qui voulaient tout savoir de leur avenir... Elles n'aimaient pas toujours ce que je leur révélais... Mais je ne pouvais que leur dire ce que je voyais.
Je n'étais pas une prêtresse d'Apollon, j'étais une prisonnière éprise d'une liberté à laquelle je ne pouvais même pas rêver. Mais je faisais ce qu'on me demandais, portée par une joie liée à ces petits instants précieux, ces moments où je parvenais à voir dans les yeux des personnes l'étincelle de joie qui me redonnait espoir en la vie.
Et puis un jour, ce don devint une malédiction... Encore plus que celle à laquelle j'étais habituée au cours de mes longues années... J'avais grandit, j'avais près de 25 ans à présent... Et Apollon vint me voir en personne... Et désira faire de moi sa déesse, et briser cette pureté qui m'était devenue si chère, si propre à ma personnalité. Elle était la seule qui me procurait ce don de vision... Et je n'avais aucunement envie de me défaire de cette faculté, qui me procurait pourtant autant de malheurs.
Le dieu n'accepta pas ce refus... Et quand je dis qu'il n'accepta... Il entra dans une rage folle et se mit à détruire tout ce qu'il pouvait... Moi au passage... Mais je lui refusais cette joie... Et m'en enfuie dans la nuit, quittant pour toujours la ville et le pays qui m'avait vu grandir...
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Les années passèrent puis les décennies, toujours à me cacher de la colère d'Apollon. La peur me tiraillait à chaque instant et l'anonymat était devenu mon pain quotidien. Tellement embarquée dans cette fuite sans fin, traversant les contrées, traversant les mers... Que je ne remarquais pas ce qui aurait du me sauter aux yeux... Je ne vieillissais pas !
Je venais de dépasser les soixante années sur cette Terre, et j'avais toujours le visage de mes 25 ans. Cette révélation face à mon reflet dans l'eau d'une rivière me figea d'effroi. Étais-je encore plus spéciale que je ne l'avais imaginé ?
Un siècle passa, puis deux, puis dix... Puis quinze... Une vie toujours passée à tromper le monde, lui cachant celle que j'étais réellement... Au point de me perdre moi-même. J'en avais oublié l'enfant plongée dans ses rêves... Je ne savais plus ce que voulais dire rêver. Mes visions étaient toujours là, mais je faisais de mon mieux pour les ignorer, préférant une vie solitaire et vagabonde. J'avais apprit à me défendre aussi bien physiquement que mentalement contre ses attaques... Je ne savais pas comment il faisait pour me retrouver à chaque fois. La présence d'Apollon hantait le moindre de mes pas. Je le savais toujours à ma recherche, sa colère me poursuivant comme une ombre malfaisante. De nombreux hommes souffraient de cette hargne à mon égard, au point que je décidais de m'isoler au cœur d'une forêt, devenant moins que l'illusion d'un être vivant... Je passerais ma vie ici, je l'avais décidé, plus personne ne souffrirait de ma décision de ne pas avoir accepté les avances d'un dieu. Je tins paroles durant près de cent ans, vivant en recluse totale sans aucune relation avec qui que ce soit. Et avec la sensation qu'Apollon avait enfin abandonné son aversion dévastatrice envers moi. Jusqu'à un matin... Éveillée par une vision beaucoup plus forte que les autres, plus intense et plus précise... Celle d'une jeune femme ! Je ne connaissais pas son nom et encore moins qui elle était, mais je savais au plus profond de moi qu'elle serait ma bénédiction.
Je quittais alors ma vie de recluse, sachant au plus profond de moi que jamais je ne trouverais celle qui m'était apparue en restant ici sans pour autant savoir où cela se produirait.
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Jusqu'à ce qu'arrive cette nuit... Une nuit comme toutes les autres, froide et humide. J'avais rejoint une contrée de l'ouest, je ne connaissais même pas son nom. Tout ce que je savais, c'est que j'avais du traverser une mer pour y arriver. Mais même les océans n'étaient pas une protection contre la furie d'Apollon, qui bien qu'elle se soit apparemment apaisée, n'était certainement pas effacée...
Et ils l'étaient encore moins contre la folie des hommes...
Je m'étais réfugiée dans une taverne, cherchant un endroit pour passer la nuit au sec et éviter la tempête qui n'allait pas tarder. Être une femme, et qui plus est, plutôt jolie qui plus est, était parfois un atout, parfois un problème. J'avais bien pensé cette soirée là que cela était plutôt en ma faveur. L'aubergiste m'avait fourni une chambre alors qu'il avait annoncé qu'il n'y avait plus de place au client précédent. Je l'avais remercié avec enthousiasme et un grand sourire...
Puis je m'étais littéralement jetée sur un bol de soupe et une miche de pain. Je ne vieillissais peut-être pas, je ne savais pas non plus ce que j'étais réellement (Cette question demeurait dans un coin de ma tête mais la peur d'Apollon prenait le dessus sur tout ces mystères), mais mon corps avait besoin de tout ce que ceux des humains normaux demandaient, de la nourriture et du repos. Enfin, je m'étais rendue dans ma chambre, m'étendant avec délice sur une couche certes un peu dure mais sèche.
Il me semblait que j'avais à peine fermé les yeux qu'un bruit de grincement m'avait réveillé... Puis des bruits de pas... Un homme s'était glissé dans ma chambre... J'avais espéré qu'il s'agisse d'un client un peu éméché qui se serait trompé... Mais cela n'avait pas été le cas et tout c'était passé très vite... L'homme s'était jeté sur moi, une main plaqué sur ma bouche et avait commencé à déchirer mes vêtements... Et malgré mes coups, je ne pouvais rien faire contre les agissements de celui-ci.
J'ouvrais les yeux... Me rendant compte que tout cela n'était qu'un rêve... Jusqu'à ce que le grincement provenant de la porte me mette en alerte. Le même homme que celui de mon songe se trouvait près de la porte et, me voyant éveillé, me sauta dessus exactement comme dans ce que je savais être à présent une vision. Je me débattais avec force, avec rage, refusant de me laisser faire... Jusqu'à ce qu'un événement dépassant mes connaissances se produise. L'homme se mit hurler... Je ne compris ce qui se passait qu'après une paire de seconde... Une créature mugissante semblait tourner dans la chambre, tout autour de nous... Je ne comprenais pas... Hurlais à mon tour au-dessus de tout ce qui avait pu sortir de ma bouche à ce moment...
L'homme me lâcha un instant... Et la créature disparue...
Mais loin d'être effrayé, encore plus enragé, il revint à la charge, alors que je sentais mes forces me quitter... Et je perdis connaissance, persuadée, au cœur de la brume qui m'entourait, que si jamais je me réveillais, mes visions m'auraient pour toujours quittée.
*****
Lorsque je revins à moi, la première image qui me sauta aux yeux fut celle d'un visage qui me suivait depuis bien longtemps déjà... Le visage de la belle demoiselle. Celle qui m'avait poussé à quitter mon repère et reprendre la route dans l'espoir de la retrouver.
Et je découvris bien vite que, non seulement elle m'avait sauvé, mais qui plus est, elle était arrivée à temps, j'avais conservé mon don... J'avais vu son passé, la manière dont elle m'avait protégée des assauts de mon agresseur, une vision affreuse qui me hante encore aujourd'hui, mais dont je conserve le souvenir comme le plus beau des cadeaux.
De plus, je me rendis compte que plus que mes visions, je possédais d'autres dons... Je pensais même que la jeune femme en était responsable.
Le premier me prit par surprise... Je sus immédiatement que la jeune femme, qui se prénommait Elaine (Mais je préfère l'appeler Sofia, c'est le nom qu'elle porte aujourd'hui!), n'était pas une humaine comme les autres. Sans pouvoir le retenir, je lus en elle celle qu'elle était réellement, un néphilim, fille d'un Aspect et d'une humaine. Ce qu'était un Aspect, je n'en avais pas la moindre idée à l'époque... Mais je savais qu'elle en était la progéniture !
Une autre capacité me fut expliquée par Sofia elle-même. Je ne la compris pas tout de suite... Mais me souvenant de ce qui s'était passé lors de cette terrible nuit, me souvins de la créature au-dessus du lit. Je découvris que cette être était le fruit de ma création... Et qu'il n'avait jamais réellement existé. Il n'était qu'une illusion que j'avais été capable de créer pour me protéger. Même si cela m'avait affaibli au plus haut point, me laissant sans défense par la suite.
Oh que je ne saurais dire à quel point je lui suis reconnaissante, encore aujourd'hui !
Elle m'a sauvé la vie et est devenue ma meilleure amie, m'a apprit à me rouvrir au monde et elle m'expliqua aussi qui j'étais... Enfin son frère me l'expliqua. J'étais ce qu'il appela une fey, une créature magique, immortelle et aux pouvoirs étonnants. Mon don de vision étaient l'un d'eux. La nouvelle me laissa sans voix... Même si il fut incapable de me définir correctement... J'apprit que j'étais probablement l'unique représentante de ma race et que cela risquerait d'être compliqué de découvrir qui j'étais réellement. Mais cela ne me posa pas vraiment de soucis... J'avais trouvé une nouvelle famille!
*****
Je retrouvais peu à peu un semblant de vie normale. Usais de mon don de vision et de perception pour aider Sofia et son frère à l'aboutissement de leur création, une école pour gens aux dons spéciaux. Nous étions en l'an de grâce 1205.
L’Institut Chevalier vit le jour en France. De l'autre côté de la mer que j'avais traversée. Je devins professeure au sein de cette école, enseignant ma capacité la plus puissante et la plus maîtrisée, la voyance.
Jusqu'à ce que je découvrisse quelque chose d'étonnant... Le temps avait toujours fait partie de moi. Je le ressentais, voyais à travers son avancée, il faisait partie de moi, il était mon ami le plus fidèle... Mais un jour, le temps passa du côté obscur, il sembla se figer autour de moi... J'étais étendue sur l'herbe, seule – la solitude était un besoin que je ressentais de temps à autre, une réminiscence de mon passé d’ermite – et les oiseaux cessèrent subitement de chanter, le vent s’arrêta de souffler... J'ouvris les yeux et découvris que l'oiseau était figé en plein ciel, tout comme l'était son chant. Une pointe d'angoisse s'empara de moi et au moment même, le temps reprit son cours et l’oiseau son vol.
Je n'en parlais pas. Cela me semblait impossible. Je devais avoir rêvé. L'impossible n'était pourtant pas quelque chose qui demeurait dans mon vocabulaire... Mais cela me semblait maléfique et dangereux... J'y voyais l'action d'Apollon. Il ne m'avait pas retrouvée depuis que je vivais à l'école... Mais qui pouvait savoir, peut-être avait-il finalement pisté ma trace. Je préférais donc ne pas en parler. Ne pas mettre les autres en danger.
Et cela ne se reproduit pas, pendant de très longues années...
Jusqu'à ce que ma joie de retrouver Sofia, partie pour un long voyage (beaucoup trop long à mon goût) nous piège toutes les deux dans une bulle. Le monde autour de nous ne bougeait plus, nous étions les seules à pouvoir nous mouvoir au coeur d'une bulle immobilisée.
La peur que Sofia lu dans mes yeux lui permit de comprendre que ce n'était pas la première fois que je vivais cela... Elle m'expliqua donc ce dont il s'agissait, en me rassurant, m'affirmant qu'elle aussi était capable d'agir ainsi. Elle me parla pour la toute première fois de la chronokinésie.
Un don rare et étonnant, permettant bien des choses mais... Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités... Et aussi de parvenir à le maîtriser.
Et je dois avouer que j’eus la meilleure des professeurs, Sofia en personne. Elle me guida dans cet apprentissage long et fastidieux de la manipulation du temps. Loin d'être maléfique, la chronokinésie était un pouvoir magnifique, mais qui semblait me glisser entre les doigts. Malgré des cours intensifs, je restais bien loin derrière les possibilités d'action de Sofia.
Et l'utiliser m'épuisait au plus haut point.
Mais le temps ne me manquait pas pour apprendre à pratiquer et supporter les effets de ce que j'aimais appeler la capacité de parler au temps. Oui ! Je pouvais le voir depuis ma plus tendre enfance... J'étais à présent capable de lui parler. Avec des limites que j'avais encore bien du mal à dépasser. Cela me demandait une énorme concentration. Mais Sofia continue encore aujourd'hui à me donner des cours réguliers afin que je parvienne un jour à contrôler cela avec plus de facilité.
Cependant, lorsque le danger pointe le bout de son nez, et cela est plus que jamais monnaie courante pour l'Institut ces derniers temps, ce don devient l'une de mes meilleures protections. La peur et la volonté de protéger ceux qui comptent pour moi le rend plus puissant que jamais... Tout du moins à mon niveau. Mais cela est parfois erratique. Je ne perds cependant pas espoir de parvenir un jour à maîtriser le don de parler au temps avec la même facilité que j'ai lire dans l'âme des gens !
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Depuis que j'ai rencontré Sofia, je suis devenue aussi indissociable de l'école que les arbres centenaires qui l'entourent. Professeure aimée, respectée, bien que parfois pas toujours prise au sérieux (c'est le problème lorsqu'on s'attelle à enseigner un sujet aussi fuyant que la voyance), je vis à présent une vie calme, sans avoir à garder un œil dans le dos.
Je suis devenue ouverte au monde et même bout en train... Jamais la dernière à assister à une fête ou faire une blague (Quoi ? Si c'est du jeu quand même quand on est capable de savoir si la blague va avoir l'effet escompté ou pas!)
Mais il est quelque chose qui demeure difficile pour certaines personnes qui m'entourent. Pure de corps et d'esprit ! C'est celle que je suis et souhaite demeurer pour l'éternité (ou jusqu'à ce que la mort me prenne par surprise!). Parfois, cela se passe on ne peut mieux, les relations humaines ne me sont pas interdites... Mais parfois cela pose des problèmes. Je ne m'en rends pas toujours compte et oublie parfois que j'ai l'apparence d'une jeune femme que certains considèrent comme séduisante. Je déteste cela, faire souffrir les gens ainsi. Certains ne se contentent pas d'une simple amitié. Je pourrais être amie du monde entier, j'ai le cœur bien assez grand pour ça... Mais jamais je ne donnerai mon corps. Ce n'est pas après avoir passé plus d'un millénaire à fuir un dieu que cela va changer. Mon corps est un temple que personne ne peut toucher et cela ne saurait changer !
Enfin, quand je dis « ne peut toucher », je parle au sens biblique. Je n'ai jamais repoussé un contact humain. Un bise, un câlin, une poignée de main ! Même si ce contact risque de vous dévoiler plus que vous ne le pensez...
Car je suis la Pyhtie, et même si mes visions sont parfois floues, parfois énigmatiques, elles en dévoilent toujours plus sur vous que vous ne le souhaiteriez... Mais soyez rassuré ! Clara sait tenir sa langue lorsque cela est nécessaire !
Le temps restera toujours une vague mystérieuse... Mais si il estime que nous sommes en droit de savoir certaines choses... Vous pouvez me faire confiance, je vous le ferai savoir ! .